Grandir autrement : quand les enfants deviennent ambassadeurs d’un mode de vie éco-responsable et égalitaire

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Grandir autrement : quand les enfants deviennent ambassadeurs d’un mode de vie éco-responsable et égalitaire

20 novembre 2025

À Annecy, aux pieds des montagnes et au cœur d’une petite maison familiale débordant de vie, la famille Durand incarne au quotidien une nouvelle façon de grandir : connecter les enfants à la nature, transmettre la sobriété joyeuse et contrer les dérives d’une société marquée par la surconsommation, l’influence des réseaux et les stéréotypes sexistes. Parents de quatre enfants âgés de 9 à 18 ans, Hélène et son mari choisissent de faire de leurs filles et garçons les ambassadeurs d’un mode de vie à la fois respectueux de la planète, de la santé physique et mentale, et des droits de chacun·e.

Dans un contexte où les injonctions à l’achat de cosmétiques, la sexualisation précoce sur Instagram, les modèles de « routines beauté » ou la montée de discours sexistes sont omniprésents, Hélène s’engage à montrer qu’un autre chemin est possible : celui d’une enfance reliée à la terre, à la cuisine maison, au sport sans clichés, et à la découverte de soi hors des écrans.

Depuis la cuisine familiale transformée en laboratoire de lacto-fermentation jusqu’au jardin en permaculture, du repair café local au marché paysan où les enfants vendent leur propre production, la famille transforme chaque “routine du quotidien” en atelier de transmission. Sans oublier les escapades solidaires en écovillage et la lecture partagée d’albums jeunesse engagés, conçus pour stimuler l’esprit critique face aux stéréotypes de genre.

Un mode de vie inspirant, qui, loin de l’utopie, répond à des urgences : protéger la santé des enfants (et leur peau !), cultiver leur esprit d’égalité filles-garçons dès le plus jeune âge, renforcer leur résilience face aux phénomènes inquiétants des réseaux sociaux et ouvrir la voie à une parentalité plus inclusive, inventive et connectée à l’essentiel.

Les défis d’une société en mutation

Jamais l’enfance et l’adolescence n’ont été autant exposées à des discours contradictoires. D’un côté, la pression d’un univers consumériste qui cible toujours plus tôt les plus jeunes – « L’enfant n’a pas besoin de produits cosmétiques. Or tout cosmétique, malgré une réglementation rigoureuse, expose à un risque comme tout médicament, par exemple le développement d’une allergie », rappelle le Dr Pierre Vabres, de la Société française de dermatologie. L’essor des instituts de beauté pour enfants, tout comme la multiplication des « routines beauté » sur les réseaux sociaux, véhicule une vision du corps fondée sur la performance et l’apparence, parfois dès le primaire. Conséquence : risque accru d’eczéma, d’irritations, de photosensibilisation – et, plus insidieusement, confusion entre soin et mise en scène de soi.

À cette pression s’ajoutent de nouveaux périls sanitaires. Phénomènes portés par TikTok et Instagram, des milliers d’adolescentes s’exposent sans aucune protection au soleil pour obtenir des « burn lines » ou « tan lines », au prix de brûlures parfois graves. « Les coups de soleil dans l’enfance et l’adolescence sont le premier facteur de risque de mélanome, le cancer de la peau le plus grave… Dans plus de 85 % des cas, ces cancers sont dus à une exposition excessive aux ultraviolets, notamment pendant l’enfance et l’adolescence », souligne Christophe Bedane, dermatologue au CHU de Dijon.

Dans le même temps, les études et interventions en collège s’inquiètent d’une polarisation croissante entre filles et garçons. « On observe désormais deux jeunesses : des jeunes filles très informées, qui revendiquent de ne pas se laisser faire, et des garçons qui disent vouloir exister en tant qu’hommes et souhaitent arrêter d’être informés sur l’égalité », note Martine Arino, de l’association Dans le genre égales. Les réseaux sociaux véhiculent des modèles masculinistes et des discours misogynes virulents qui atteignent désormais les enfants dès la fin du primaire.

Quelques chiffres éclairent ce contexte : 12,2 % des Français ne souhaitent pas d’enfant en 2024 (contre 6 % en 2005), ce chiffre atteignant 15 % chez les 18-29 ans. Le désir d’enfant moyen chez les femmes de moins de 30 ans est passé de 2,5 à 1,9 enfants entre 2005 et 2024 (Ined). Moins de 17 % de filles sont présentes dans les grandes écoles scientifiques en 2024, et chaque année, il manque environ 20 000 ingénieurs et 60 000 techniciens dans les filières scientifiques françaises, alors que cette vocation est freinée dès le collège par le poids des stéréotypes. 75 % des jeunes aimeraient bénéficier de plus d’éducation affective et sexuelle à l’école, alors que seuls 15 % d’entre eux ont eu plus de six séances sur le sujet.

Les experts appellent à une vigilance accrue. « On doit apporter une information intelligente et égalitaire en ligne aux ados. Sinon, ils iront toujours s’informer ailleurs… Si on n’agit pas maintenant, on perd une génération », alerte Ynaée Benaben, de l’association En avant toute(s). Le Haut Conseil à l’Égalité, dans son rapport 2025, souligne le basculement de la société après le procès des viols de Mazan : « Entre prise de conscience accrue du sexisme systémique d’un côté, et lente introspection masculine de l’autre. »

Face à cette situation, certaines familles s’emparent du défi : développer la confiance en soi par le faire et le partage ; privilégier les cosmétiques naturels et sûrs, pensés pour toute la famille ; favoriser la lecture, le jardinage, la cuisine, le sport mixte plutôt que l’accumulation de produits ou la comparaison sur écran. Pour beaucoup, « il ne suffit pas d’apprendre à se protéger du soleil… il faut aussi apprendre à questionner les normes, à ressentir, à cultiver son regard critique », insistent des thérapeutes engagés.

Cette approche de transmission éco-responsable et égalitaire dès l’enfance est désormais un enjeu de santé publique, d’équilibre social et d’émancipation collective. Elle vise à outiller des enfants capables de naviguer entre infox, marketing et inégalités ; à relier la sobriété joyeuse, la relation à la nature et la construction de soi. Grandir autrement, c’est préparer des citoyens lucides, critiques et inspirants, pour leur famille et bien au-delà.

Un contexte international en pleine évolution

À travers l’Europe et le monde, la question de l’éducation des enfants face aux enjeux écologiques, sociaux et d’égalité connaît de profondes mutations. Longtemps, la famille et l’école furent les principaux vecteurs de transmission, mais l’avènement des médias et des réseaux sociaux a bouleversé les repères dès le plus jeune âge.

L’émergence d’un marketing agressif destiné aux enfants — des cosmétiques aux vêtements et jeux connectés — a imposé de nouveaux standards de consommation et de beauté. Selon l’UNICEF, la pression commerciale sur les enfants a doublé en trente ans à l’échelle mondiale. En France, l’offre de cosmétiques ou d’ateliers beauté ciblant les plus jeunes a été dénoncée par la Société française de dermatologie pour ses risques potentiels : allergies, eczéma, perturbateurs endocriniens, mais aussi construction de l’image de soi fondée sur l’apparence. Des États-Unis à la Corée du Sud, la multiplication de “spa kids”, box beauté et challenges TikTok visant les préadolescent·e·s est observable.

En parallèle, malgré des décennies de lutte pour l’égalité filles-garçons, les stéréotypes genrés persistent. Une enquête du Haut Conseil à l’égalité (2025) montre que 46 % des 8-15 ans sont confronté·e·s à des propos sexistes ou discriminants, et près de 30 % des adolescentes se disent moins libres que leurs frères dans le choix de leurs loisirs ou tenues. Cette pression s’accroît avec l’usage des réseaux, qui diffusent à la fois des modèles archaïques — propos masculinistes, « body count », défis de bronzage risqué… — et des figures inspirantes : joueuses de football ou de rugby devenant modèles pour d’autres. Les pays d’Europe du Nord (Suède, Norvège, Islande), qui investissent dans l’éducation à l’égalité et par la nature, voient reculer le sexisme ordinaire et croître le bien-être des enfants.

Au niveau international, la prise de conscience écologique chez les jeunes s’affirme. En 2023, 73 % des adolescent·e·s européens souhaitaient « grandir en harmonie avec la nature », et 41 % voulaient s’engager pour la planète (Baromètre européenne de la jeunesse et de la transition écologique, 2024). De nombreux mouvements, comme Fridays for Future, dynamisent les écoles, stimulent la multiplication de projets potagers ou de compostage. En France, les familles, de taille plus réduite, cherchent davantage qualité de vie et transmission de valeurs dans un contexte d’anxiété climatique et d’incertitudes économiques.

Face à ces évolutions, des familles — rurales ou urbaines, socialement diverses — inventent de nouveaux rituels : ateliers zéro-déchet ou nature parents-enfants, implication précoce dans les AMAP, participation à des repair cafés ou à la vie associative. Les outils éducatifs alternatifs se multiplient : livres jeunesse sur la permaculture ou l’égalité, jeux coopératifs, podcasts et applications ludiques sur la biodiversité, carnets de voyages partagés. Cette dynamique est visible ailleurs : au Québec, en Allemagne et en Espagne, des écovillages placent les enfants au centre de la transition, via la “pédagogie du faire ensemble” et des espaces d’échanges intergénérationnels.

Entre marketing, normes sociales, dérives numériques et urgence climatique, il est désormais crucial d’accompagner les enfants sur des voies alternatives : plus d’ancrage dans la nature, de créativité, d’autonomie et d’apprentissage du vivre-ensemble. L’enfance se révèle ainsi comme l’un des laboratoires essentiels de la société de demain.

Des initiatives concrètes, du quotidien à la transmission

Les enfants sont aujourd’hui exposés à la cosmétique dès le plus jeune âge. Selon la Société française de dermatologie, l’usage de tels produits chez les enfants n’est pas seulement superflu, il est risqué : allergies, eczémas, irritations, photosensibilisation sont signalés, même avec des produits certifiés. Pourtant, le marché français de la cosmétique “kids” croît de plus de 15 % sur trois ans, tiré par l’influence des réseaux sociaux et des stratégies marketing ciblées.

Les réseaux sociaux touchent massivement la jeunesse : près de 60 % des adolescents français y consacrent plus de deux heures par jour (Credoc 2024). Ils y rencontrent des modèles genrés, l’hypersexualisation, ou la banalisation de pratiques dangereuses comme les « tan lines ». Moins de 20 % des familles abordent les dangers de la cosmétique ou du bronzage en famille.

La production de livres jeunesse sur l’écologie, la vie locale, l’égalité filles-garçons, a doublé en dix ans. Des collections comme "Les Enfants du Vivant", "Les As de la Récup" ou "Héroïnes écolos" ont du succès. 82 % des parents sensibles à l’environnement offrent au moins un ouvrage sur l’écologie ou l’égalité des sexes à leurs enfants (Etude Babelio 2024).

Cet engagement passe aussi par les associations. De plus en plus de marchés de producteurs ou repair cafés proposent des créneaux enfants (« petits réparateurs », stands pédagogiques, ateliers). Certaines fermes ou AMAP organisent des tournées éducatives où les enfants contribuent à la récolte, à la pesée des paniers et à la confection de baumes maison.

Quant aux voyages familiaux, le choix des circuits alternatifs prend de l’ampleur : 34 % des familles engagées préfèrent les écovillages, fermes bio ou initiatives locales, plutôt que le tourisme classique (Enquête ADEME/GreenTripKids). Ces expériences conjuguent découverte de femmes inspirantes, immersion dans la vie rurale, activités d’égalité filles-garçons.

L’éducation, toujours, reste un levier. Seulement 16 % de femmes parmi les admis à l’École polytechnique en 2024 (contre 23 % en 2023). Les expériences de mixité dès le plus jeune âge sont reconnues pour renforcer confiance en soi et esprit d’équipe.

Pour finir, la prévention et le dialogue sur les droits de l’enfant sont eux aussi essentiels. Depuis 2022, plusieurs associations insistent sur l’importance de faire des familles des actrices du dialogue. Seuls 15 % des jeunes disent avoir reçu une éducation affective et sexuelle solide ; 75 % voudraient davantage d’échanges parents-enfants sur ces thèmes.

Cet article ouvre des pistes concrètes pour accompagner les enfants dans un monde où les repères bougent vite, parfois au détriment des plus jeunes. La transmission de valeurs écologiques et égalitaires évolue au gré des expériences simples du quotidien, au jardin, au marché, en cuisine.

Pour prolonger la réflexion, témoignages, recettes et trouvailles de livres jeunesse peuvent être partagés au sein de la communauté “Familles Bio & Zen”. Chaque mois, une newsletter “Lettres Vertes en Famille” propose idées de sorties, lectures, podcasts ou activités DIY à réaliser avec les enfants. Des enseignants, animateurs ou éducateurs pourront prochainement accéder à un dossier complet d’outils et de ressources pour l’écologie et l’égalité.

Parmi les ressources utiles : le carnet d’adresses des marchés paysans “kids-friendly” en Auvergne–Rhône-Alpes, la sélection “Livres jeunesse & égalité” de la médiathèque d’Annecy, ou encore les podcasts familiaux “Petits pas verts”, “Radio Bobines” et “Grandir curieux(se)”.

D’autres portraits de familles, des tables-rondes “parents-ados-éducateurs”, ou des rencontres lors de salons associatifs sont à venir, pour continuer à cultiver ensemble l’équilibre, la simplicité et la joie de vivre autrement, un geste à la fois.

Ressources pratiques :

  • Livres jeunesse : “Les Enfants du Vivant” (Nathan), “Les filles peuvent le faire aussi !” (Kimane), “La grande fabrique des mots” (Alice Jeunesse), “Permacool – le jardin malin” (Actes Sud Junior), “Héroïnes écolos” (Bayard).
  • Recettes à faire avec les enfants : crackers sans gluten aux herbes du jardin, yaourt vegan maison, chou lactofermenté, crèmes réparatrices à l’aloe et au calendula.
  • Applications et podcasts recommandés : Olio, Too Good To Go, “Bestioles” (France Inter), “Les couilles sur la table” (Binge Audio, pour parents/ados).
  • Marchés paysans kids-friendly : samedi matin à Annecy ("Mini-fermiers"), AMAP “graines de bio” à Albertville, ateliers enfants au repair café de Seynod.
  • Suggestions sportives locales pour éveiller l’esprit d’égalité : rencontres avec l’équipe féminine locale d’Annecy football, visionnage de matchs féminins de l’OL ou de la Juventus pour dépasser les stéréotypes dans le sport.

Petit quiz famille : “Quel héros/héroïne éco-responsable es-tu ?”

Une série de questions autour du quotidien éco-responsable, des choix d’activités ou de lectures, pour découvrir en famille s’il y a un Jardinier(e) du Vivant, Petit(e) Alchimiste, Veilleur(se) des Forêts ou Messager(ère) de l’égalité à la maison.

Challenge à relever en famille

Essayer le défi “7 jours pour une famille zéro-déchet & égalitaire” et partager ses retours en ligne ou au sein d’espaces participatifs !

Transmettre, protéger, inventer… pour que chaque enfant devienne à son tour un ambassadeur joyeux de la nature et de l’égalité.

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